Page 281

— 11 —

personnes m'ont dit n'avoir pas été plus favorisées que moi à
cet égard; mais M. Leichtlin ayant bien voulu m'en envoyer, le
12 juin dernier, un oignon qui venait de fleurir et qui avait donné
des capsules mûres, j'ai pu me fixer sur la manière dont se
produit la tige florifère chez cette espèce. J'ai vu ainsi qu lorsque,
par l'effet de l'âge ou par suite de l'ablation de ses caïeux épiphylles,
la bulbe a pu acquérir une force suffisante, son axe
fondamental, c'est-à-dire la tige épaisse et très-raccourcie qui
porte inférieurement les racines, sur ses côtés les tuniques sèches,
les écailles et les feuilles fraîches, à son extrémité supérieure
le bourgeon terminal, c'est-à-dire encore ce qu'on nomme
vulgairement le plateau, son axe fondamental, dis-je, s'allonge
considérablement par son sommet et donne ainsi une grosse
tige fistuleuse à l'intérieur, qui porte inférieurement les feuilles
longues et rapprochées au bas, courtes et espacées plus haut,
supérieurement une grappe de belles fleurs roses, campanulées,
pendantes. Ce développement d'une tige florifère épuise entièrement
la plante, et, à moins que, comme il arrive quelquefois sa
bulbe n'ait produit en même temps un petit nombre de caïeux
que je n'ai pas eu occasion de voir, mais qu je crois devoir être,
dans ce cas, analogues aux caïeux ordinaires, c'est-à-dire axillaires,
il n'en reste absolument rien en terre, l'espèce ayant acquis
alors, en place de son mode de multiplication purement végétative,
ses moyens de reproduction essentielle ou sexuelle,
le fruit et la graine. L'oignon de ce Lis ne fleurit donc qu'une
fois, ou, en d'autres termes, il est monocarpique. Il diffère en
cela de celui qui existe chez plusieurs espèces du même genre,
et qui, ne donnant pour tiges florifères que des productions
latérales, peut fleurir plusieurs années sans périr. D'autres espèces
de Lis, notamment ceux à rhizome de l'Amérique du Nord, ont
aussi un oignon monocarpique; mais l'organisation et le développement
de cet oignon diffèrent de ceux que je me suis
proposé de fair connaître dans cette note et qui mont paru assez
curieux pour mériter d'être décrits.

Paris. — Imprimerie horticole de E. DONNAUD, rue Cassette. 9.