No. 163: Brouillon lettre B de V au duc du Chatelet - 1781/03/01

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A Newport le 1er mars 1781

M. [des Loteux] vient d’arriver, M. le duc, il m’a remis les lettres que vous m’avez fait l’honneur et l’amitié de m’écrire les 30 may, 3 et 15 xbre. Le bien que vous en pensez et l’intérêt que vous y prenez doivent vous répondre de mon attention à luy procurer des occasions de se bien montrer et de le faire valoir, il serait même très possible qu’elles ne fussent pas eloygnées, M. le cte de Rochambeau m’ayant déjà pressenti sur un détachement qu’il se proposait de me confier, pour être porté par l’escadre aux ordres de M. le cher Destouches dans la baye de Chesapeack, à l’embouchure de la rivière de James, y débarquer et me réunir à M. de La Fayette et à MM. de Stuben et de Nelson, qui doivent avoir amenées de l’armée du Nord, ou rassemblé en Virginie mille hommes de trouppes continentales, et quatre à cinq mille hommes de milices. Avec ces moyens réunis, il serait facile sans doute de faire cesser les déprédations que commettent les anglais depuis deux mois dans cette province, mais toutes les espérances étant d’abord unie à des vents qui peuvent nous empècher de prévenir l’escadre anglaise dans la baye de Chesapeack, ou à des événements encor plus désagréables, j’attendrai pour me réjouir que je sois débarqué à Hampton, et en mesure de pouvoir attaquer Arnold avec quelque apparence de succès. Au reste quelque soient les événements de cette mission je vous en instruirai avec exactitude, mais ce dont je veux vous entretenir Monsieur le duc dans ce moment cy, et que je vous répéterai mille fois, c’est que je suis charmé de la suite que vous avez mis à votre amitié pour moy, depuis plus de 25 ans, que j’en joui dans les moments de contentement, qu’elle me serait d’une resource infinie si j’étais affligé, que je n’oublirai jamais avec quelle bonté vous avez bien voulu vous occuper de l’établissement de ma fille, et surtout le sentiment que vous m’avez montré au moment de mon départ, cette profession de foi qui vous assure tous les

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sentiments de mon coeur doit aussi vous répondre qu’il n’est ny lieu, ny distances, ny événement qui puisse m’empècher Monsieur le duc de vous être à jamais tendrement dévoué.

Je vais gronder Me de Vioménil à qui j’avais laissé tout pouvoir de disposer à son gré pendant mon absence, de ses enfants comme de tout ce qui peut m’appartenir, de n’avoir pas terminé sans me consulter le mariage que vous avez eu la bonté de luy proposer pour ma fille, votre opinion, et ce que j’ay scu d’ailleurs par M. de Damas, du goût de M. de Gestas pour le travail, de ses sentiments, et de son respect pour Madame sa mère comme de la résolution qu’il a prise de se renfermer à la campagne pendant deux ans pour payer ses pertes du jeu et s’éloygner des occasions de les renouveller, tout cela annonce un fond d’honneur qui vaut encor mieux pour le bonheur de ma fille qu’une fortune plus considérable. Je prierai en conséquence Me de Vioménil de ne s’arrêter à aucune des autres propositions qui luy ont été faittes, et de prende avec Madame la marquise de Gestas tous les arangements, qui pourront assurer à ma fille l’honneur de luy appartenir. Ce que je désirerais seulement c’est que le mariage ne fut pas fait sans que M. le Mis de Gestas et ma fille ne se connussent assez, pour qu’il leur devint égallement agréable.

Mettez moy, je vous prie M. le duc au pieds de Me la duchesse du Chatelet Vous ne sauriez luy dire autant de bien du grand Damas que nous en pensons tous icy, il est si généralement aimé, et mérite si bien de l’être que je donnerais deux doigts pour être sur que mon fils put un jour se conduire et penser comme il fait. Si M. son père et Madame sa soeur avaient quelquefois la bonté de se souvenir de moy, prenez ce moment là je vous en prie pour leur parler de mon attachement et de mon respect. Quelque soient les on-dits de Paris et de Versailles sur la prétendue désunion de notre petite armée, soyez sur que tout ce qui est icy n’y veut et n’y fait que ce qui peut convenir à notre général et qu’il est impossible que le roy soit servi nulle part avec plus de gayté et d’exactitude qu’à Newport.

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